Arrêt express de 24h à Potosi pour visiter la mine. Celle-ci
est la plus vieille du pays, en activité depuis 1545 ! On y exploite de
l’argent et du zinc essentiellement. Nous avons fait la visite le dimanche,
lorsque les mineurs sont au repos, mais celle-ci peut se faire n’importe quand,
ce qui est encore plus déroutant. Avant cela, petit détail, il faut signer une
décharge annonçant les innombrables risques et réfutant toute responsabilité de
la compagnie.
La visite commence par un habillage en règle :
pantalon, veste, bottes et casque, et rien en dessous parce qu’il va faire très
chaud une fois à l’intérieur. La température monte jusqu’à 45 degrés !
Une fois notre accoutrement revêtu (comme dirait notre
guide, on a l’air de faux mineurs !), on s’arrête dans un mini magasin
acheter des cadeaux aux mineurs : cigarettes tabac-coca, gants, jus de
fruit, coca, alcool à 96° (à boire !), bâtons de dynamite…. Nous sommes 4
touristes, plus notre guide Daniel qui travaille à la mine toute la semaine et
fais les visites organisées le WE. Chez lui, on est mineur de générations et
générations.
La visite commence quelques km plus loin à l’entrée de la
mine. Des baraquements en pierre bordent la voie ferrée, ils servent aux
mineurs à se changer avant d’aller travailler, le sol est boueux et jonché de
déchets et vieux vêtements.
On entre donc dans la mine en suivant les rails. Au début
l’air est frais, très vite on n’y voit plus rien et on patauge dans la boue.
Après quelques centaines de mètres et une première bifurcation, le chemin se
rétrécit, le plafond se fait plus bas, la température monte et l’air commence à
manquer et à être saturé de poussière. Le guide nous explique qu’il y a près de
125km de galeries, que c’est un vrai labyrinthe et que l’année dernière des
touristes se sont perdus et ont été retrouvés au bout de 24h. C’est est trop pour moi et je fais demi-tour
sans plus attendre. Il faut savoir que la visite dure 1h30, et je ne me sens
pas capable d’aller au bout ! C’est donc Laurent qui va finir la visite et
le récit pendant que je rejoins l’air libre.
Si on oublie tout le reste, le coté spéléo, pour qui n’est
pas clostro, est plutôt rigolo.
Mais oublier le reste est impossible.
Il fait chaud, très chaud, les plafonds sont horriblement
bas, les soutènements pourris, et de temps en temps du sable puis quelques
pierres débaroulent de façon inquiétante…
Respirer poussière, amiante, arsenic, casser et charrier de
la caillasse comme un força en courbant l’échine sous un plafond instable et
une température infernale n’a rien à voir avec de la spéléo.
Les mineurs, les plus vaillants et les mieux payés gagnent 550€ par mois, soit une misère.
Et quand le guide parle de la chance de gagner beaucoup
d’argent en découvrant et en exploitant une bonne veine, ce que la plupart ne connaîtra
jamais, cela ne rapportera que 1200€
mensuel seulement pendant quelques mois…
Tout ça pour mourir à
45 ans de la silicose ou ensevelit dans la mine.
Qui plus est, même en Bolivie, si une ‘’telle’’ somme permet
d’améliorer grandement le quotidien, cela ne laisse pas forcément la chance à
la génération suivante de se sortir de la mine.
Ici tout mineur descend d’un grand-père mineur, d’un père
mineur, a un oncle mineur, un beau frère mineur…
Les accidents de travail sont légions, l’année passée 35
mineurs y sont restés.
Si les mineurs peuvent se nourrir de la mine, la grignotant
chaque jour plus profondément en se rapprochant de l’enfer, la mine se nourrit des mineurs et les avale impitoyablement.
Même si on peut admirer la force de ces gens ainsi que leur
solidarité et leur abnégation, ce genre d’endroit ne devrait pas exister.
Le plus triste pour le peuple bolivien, c’est que n’ayant
pas les moyens de raffiner leur minerai au-delà de 50%, ils envoient tout cela
au Chili pour traitement, perdant ainsi une grande partie de la valorisation du
produit. Et ayant perdu, lors de la guerre du Pacifique (fin 19ème), la bande côtière qui leur aurait permis une
exploitation directe, ils sont obligés de passer par leurs chers voisins, le
Chili et le Pérou…